Guerres mondiales : de la destruction à la mémoire partagée
La Première Guerre mondiale : une génération sacrifiée
La Grande Guerre bouleverse profondément les communautés rurales du pays bégarrois. Ainsi, à Bégard même, le monument aux morts, sculpté à la sortie de la Première Guerre, recense 181 noms pour une commune qui ne comptait alors qu’environ 3 400 habitants (source : Mairie de Bégard et recensement INSEE). Presque chaque hameau possède sa stèle ou sa plaque dédiée :
- À Saint-Laurent, la plaque funéraire dans l’église atteste des pertes “incomparables” : 24 morts sur à peine 400 habitants en 1918.
- À Trézélan, le monument aux morts fut érigé dès 1922, à la suite d’une levée de fonds auprès des familles, preuve du besoin urgent de mémoire.
Le “patrimoine du souvenir” devient ainsi une composante essentielle du paysage local : croix de granit, plaques, ex-votos, arbres plantés en hommage forment un véritable “itinéraire de la mémoire” dans toute la campagne bégarroise.
La Seconde Guerre mondiale : résistance et reconstructions
Le pays de Bégard, comme nombre de régions bretonnes, fut le lieu d’une vie clandestine intense durant l’Occupation. La résistance locale, active dans les bois d’Avaugour, la forêt de Coat-an-Noz et jusqu’à la vallée du Léguer, laissa peu de bâtiments spécifiques, mais de nombreux lieux de mémoire.
- Dans la commune voisine de Belle-Isle-en-Terre, la maison du “Docteur Renault” abrita des réunions secrètes — sa façade porte encore les traces de balles, discrètes mais visibles pour le promeneur attentif.
- Des témoignages recueillis par l’Association Mémoire et Patrimoine de Bégard rapportent que plusieurs anciennes maisons servirent à héberger aviateurs alliés et agents de liaison, évitant ainsi leur arrestation.
- La Libération, en août 1944, fut marquée par des accrochages autour du pont du Guic : des impacts d’obus dans la maçonnerie du pont sont encore visibles aujourd’hui.
Après-guerre, la reconstruction et la modernisation des bourgs se font sentir : de nombreux bâtiments publics (écoles, mairie) sont rénovés entre 1946 et 1955, participant d’une “nouvelle vague architecturale” imprégnée par le souci de mémoire, en insérant systématiquement des plaques commémoratives (source : Ouest-France, édition des Côtes-d’Armor, 1947 et 1950).